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Une médecin en mission pour la santé mentale périnatale

Judy Hagshi est mĂ©decin de famille au Centre de mĂ©decine familiale Herzl de l’HĂ´pital gĂ©nĂ©ral juif. Elle est membre de l’unitĂ© d’obstĂ©trique en mĂ©decine familiale et enseigne aux mĂ©decins rĂ©sidents au DĂ©partement de mĂ©decine de famille de l’UniversitĂ© Ŕ¦°óSMÉçÇř. Elle a rĂ©cemment Ă©tĂ© nommĂ©e au premier conseil d’administration du Collectif canadien pour la santĂ© mentale pĂ©rinatale.

Dans sa jeunesse, Judy Hagshi voulait devenir psychiatre, avant de réaliser que sa passion était en fait la santé mentale en général et l’incidence de celle-ci dans la vie de tous les jours. Fille d’immigrants, elle est la première et la seule médecin de sa famille. Elle a étudié à l’Université de Toronto et fait sa résidence à l’Hôpital général juif de Montréal, où elle a rencontré son mari. Aujourd’hui spécialisée en santé mentale périnatale, elle aide les mères à surmonter des problèmes comme les troubles de l’humeur, l’anxiété et la dépression, avant et après l’accouchement.

Les problèmes de santé mentale chez les mères sont courants au Canada et dans les pays occidentaux. Une femme sur sept souffre d’une dépression grave ou d’un trouble anxieux pendant la grossesse ou le post-partum, et la mort par suicide est l’une des trois principales causes de décès maternel. Fait intéressant, un père sur dix souffre également de dépression post-partum et le risque est cinq fois plus élevé si la mère est touchée.

Selon la Dre Hagshi, nous ne sommes pas socialisés pour faire face aux défis normaux qui accompagnent l’arrivée d’un bébé, de sorte que les mères vivent des difficultés qui peuvent entraîner de nombreux problèmes de santé mentale. « Nos foyers ne ressemblent plus à ceux de nos mères et de nos grands-mères, donc l’idée qu’il faut un village pour élever un enfant devient difficile à la fois logistiquement et culturellement », ajoute-t-elle. La pandémie a aussi amplifié l’anxiété de nombreuses femmes enceintes, qui ne savent pas si elles seront autorisées à avoir de la famille pour les soutenir à l’hôpital et une fois rentrées chez elles.

Beaucoup négligent la question des semaines et des mois qui suivent l’accouchement, pour se concentrer seulement sur la date d’accouchement. Pourtant, le quatrième trimestre (les 12 semaines après la naissance) est une période d’adaptation qui s’accompagne de nombreux défis, notamment l’allaitement et les nuits blanches qui peuvent bouleverser la routine générale du ménage, mais aussi mettre à rude épreuve la relation de couple. « Nous mettons tellement l’accent sur la santé du nouveau-né que nous oublions souvent les mères elles-mêmes, dont beaucoup vivront une période très difficile », ajoute-t-elle.

Le don de l’empathie

« Les nouvelles mères ont tendance à se confier lorsqu’elles viennent me voir. Je regarde leur langage corporel et je sais les questions à poser », explique la Dre Hagshi. Écouter les femmes et les aider à verbaliser leurs sentiments représente une grande partie de son travail. « La société doit également favoriser les conversations qui permettent aux femmes de demander plus facilement de l’aide », précise-t-elle.

La Dre Hagshi parle des attributs d’un bon médecin. « À l’université, on étudie fort pour obtenir les meilleures notes possibles et cela devient notre priorité. J’ai appris cependant que c’est l’empathie qui fait un bon médecin », dit-elle. « Avant de devenir mère, j’étais très analytique dans mon comportement, mais avec l’expérience et l’empathie, mon approche a complètement changé. »

Lorsque les mères ont des débuts difficiles avec leurs nouveau-nés, des mécanismes d’adaptation dysfonctionnels peuvent s’installer et entraîner par la suite des problèmes plus importants. La Dre Hagshi confirme que la prévention primaire est essentielle, en particulier parce que les femmes craignent de se livrer ou ne reconnaissent même pas qu’elles éprouvent des difficultés.

Créer des lieux d’entraide

La Dre Hagshi rêve depuis longtemps d’ouvrir un centre communautaire, à savoir UN/A Village, où les parents pourraient apprendre, socialiser et s’épanouir parmi leurs pairs du quartier. Elle voit ce centre comme un espace intergénérationnel où les parents pourraient recevoir un enseignement structuré, en groupe et au contact les uns des autres. Elle rêve d’une programmation proposant à la fois des cours de yoga et des ateliers sur les finances et le budget. Le centre qu’elle envisage réunirait des conseillères en lactation, des gardiennes, des grands-mamans – il y aurait même des chaises berçantes.

La médecin a aussi l’idée de transformer un véhicule récréatif en centre communautaire roulant, qui se déplacerait dans différents parcs en été et réunirait les femmes du quartier pour former leurs propres groupes d’entraide. On offrirait ainsi un soutien pratique et accessible en répondant aux besoins de la communauté, un par un. Une façon tout à fait unique et économique d’assurer des services de proximité aux communautés locales!

Toucher Ă  plusieurs domaines

Interrogée sur le plus grand accomplissement de sa carrière, la Dre Hagshi a du mal à en identifier un seul. Elle a porté de nombreux chapeaux au fil des ans, travaillant comme spécialiste en lactation, dans une unité de soins intensifs néonatals ou encore une maison de retraite, toutes des expériences riches qu’elle chérit. « L’avantage d’être en médecine de famille est de pouvoir toucher à plusieurs domaines différents. C’est formidable parce que cela permet de sortir des sentiers battus. Mais est-ce que je pense que traiter les problèmes de santé mentale périnatale aidera à sauver le monde? En fait, oui! » conclut-elle. Une femme à la fois.

Actuellement en année sabbatique, la Dre Hagshi écrit un livre et s’entraîne pour courir un semi-marathon. Avez-vous des questions? N’hésitez pas judyhagshi [at] mcgill.ca (à lui écrire).

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