« La diversité biologique est intimement liée à la santé des écosystèmes », affirme Andrew Gonzalez, professeur et titulaire de la Chaire Liber Ero en biodiversité au Département de biologie de l’Université À¦°óSMÉçÇø.
« Plus un écosystème est diversifié et résilient, mieux il protège la vie qu’il abrite et plus il nous apporte des bienfaits. »
De nos jours, entre 15 et 25 % des espèces sont menacées d’extinction et la moitié des écosystèmes du monde sont dégradés. L’humanité tout entière dépend des écosystèmes pour ses ressources naturelles, mais la situation est particulièrement pressante pour les milliards de personnes qui vivent de la terre.
« C’est un gros problème, admet le chercheur. Nous sommes en train de causer des dommages irréparables, ce qui est en soi un problème d’ordre moral et éthique. »
Un dossier urgence à l’étranger et au Canada
« Au Canada, nombreux sont les emplois et les technologies dont l’existence repose sur des écosystèmes sains, explique le professeur Gonzalez. Par exemple, le secteur agricole a besoin de pollinisateurs sains pour la production des fruits. En se penchant sur les divers secteurs de notre économie, on trouve facilement de nombreux exemples de notre lien vital avec la nature. »
Comme le fait remarquer Andrew Gonzalez, la science de la biodiversité joue un rôle déterminant dans l’adoption, par les entreprises, de pratiques à la fois plus durables et plus rentables.
« Le monde des affaires s’est finalement rendu compte que toute notre économie souffrait de la dégradation des écosystèmes. Le Forum économique mondial estime que la moitié du PIB de la planète risque de s’effondrer à cause de la disparition des écosystèmes. Si ce secteur commence à s’inquiéter, c’est peut-être que le monde est enfin en train d’ouvrir les yeux. »
Diffusion de la recherche
La préservation de la biodiversité passe par une collaboration entre le monde de la recherche et les décisionnaires d’un grand nombre de secteurs.
« Nous ne gardons pas nos découvertes pour nous, bien au contraire, ajoute le chercheur. Nous préparons des conférences, des exposés de politique et des webinaires à l’intention de ministères, d’entreprises, d’ONG et de groupes de citoyens. »
« Les gens prennent des décisions en fonction de leurs valeurs, et non de la science. » Pour régler les problèmes touchant la biodiversité, il faut donc les aborder sous l’angle des sciences humaines et de l’économie et faire en sorte que la biodiversité fasse partie intégrante des processus décisionnaires dans tous les secteurs, notamment la santé, le transport et l’énergie.
Nous sommes capables de modifier les matériaux que nous produisons et de réduire les répercussions des produits que nous intégrons à notre environnement et que nous semons dans nos champs. « On assiste ainsi à des effets en cascade sur la biodiversité. Il faut donc aussi travailler avec le secteur agricole. »
De plus en plus, les écologistes et les spécialistes de la biodiversité s’associent à des détenteurs et détentrices du savoir autochtone. « La nature est intimement liée à leur langue, à leur culture et à leurs traditions. En détruisant la nature, nous nous détruisons nous-mêmes. Nous avons mis beaucoup de temps à nous en rendre compte. »
Une vue d’ensemble pour des décisions éclairées
Andrew Gonzalez est directeur fondateur du Centre de la science de la biodiversité du Québec (CSBQ), dont la mission porte sur la découverte, la surveillance et l’exploitation durable de la biodiversité au Québec, au Canada et ailleurs dans le monde. Chef de file national et mondial en recherche et en élaboration de politiques sur la biodiversité, ce réseau mcgillois regroupe 105 chercheurs et chercheuses ainsi que 700 étudiants et étudiantes aux cycles supérieurs répartis dans 13 universités.
Le CSBQ héberge également le Group on Earth Observations – Biodiversity Observation Network, aussi appelé GEO BON. Ce réseau international composé de 2 000 experts et expertes surveille l’état des milieux naturels partout sur la planète, comme le font les spécialistes du climat avec les conditions climatiques.
En collaboration avec des agences spatiales de partout – notamment la NASA et l’Agence spatiale européenne –, GEO BON observe et ausculte les forêts, les prairies et les littoraux, et il évalue l’état des écosystèmes du monde entier.
« Nous prenons le pouls de la nature quotidiennement, précise Andrew Gonzalez, également coprésident de GEO BON. Nous travaillons avec le secteur spatial ainsi qu’avec des scientifiques qui observent et étudient la nature au sol, et nous nous efforçons de rapprocher ces deux groupes. »
Des politiques basées sur des données scientifiques
Le CSBQ entretient également des liens étroits avec le gouvernement du Québec. « Le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques du Québec a approché le CSBQ et lui a demandé son aide pour la création de son réseau d’observation de la biodiversité. Le ministère voulait pouvoir surveiller les écosystèmes afin de mieux comprendre l’évolution de la biodiversité et de prendre des décisions éclairées sur l’utilisation des terres et des eaux tout en protégeant la biodiversité. »
Le chercheur fait remarquer que tout le monde gagnerait à ce que la science de la biodiversité joue un plus grand rôle dans l’élaboration des politiques, et dans les activités de planification et de gestion. Un réseau comme le CSBQ devient une plaque tournante de l’expertise en biodiversité où la collaboration et les échanges créent une synergie, et où la communication avec les partenaires de l’industrie est facilitée.
Des solutions plus rapides à des défis complexes
Andrew Gonzalez codirige le thème de recherche « Adaptation des milieux urbains » du Pôle des systèmes de développement durable de l’Université À¦°óSMÉçÇø (MSSI), réseau de recherche établi dans les deux campus de À¦°óSMÉçÇø.
Le MSSI fait croître la capacité de recherche en développement durable de À¦°óSMÉçÇø en tissant des liens entre les chercheurs et chercheuses en sciences naturelles, en génie et en sciences humaines. Il favorise la réalisation de recherches percutantes en développement durable ainsi que la création de collaborations multidisciplinaires qui facilitent la diffusion des connaissances à un large auditoire.
Andrew Gonzalez qualifie ces réseaux mcgillois influents de « multiplicateurs », soit des collaborations interdisciplinaires qui permettent la formation d’une masse critique de compétences, le regroupement de connaissances et de ressources et la focalisation stratégique des actions sur les priorités.
« Nous bâtissons des collectivités plus efficaces lorsque les acteurs de toutes les disciplines travaillent ensemble. Le Canada doit être fier de cette expertise. Nous jouons dans la cour des grands parce que nous travaillons tous ensemble, efficacement. »